Comme pour chaque femme, le parcours de santé des femmes migrantes sera accompagné par les sages-femmes, les médecins, les infirmiers … Cependant, en raison de leur vulnérabilité spécifique, il est important que les professionnels soient particulièrement bienveillants et empathiques envers les femmes qu’ils prennent en charge. Ils doivent être attentifs à la continuité des soins et à l’accompagnement dans les démarches d’accès aux droits.

Pour des femmes primo-arrivantes, le nouvel environnement dans lequel elles vivent peut être anxiogène et générer un défaut d’accès aux soins de santé. Les professionnels de santé doivent veiller à la continuité des soins par un travail en réseau (CH, PMI, …) et à proposer un accompagnement global.

Pour les femmes dont le parcours de migration est en cours, le suivi médical devra être adapté à ce contexte chaotique. Se mettre dans la situation de « one shot », c’est-à-dire proposer les examens utiles dans un temps réduit et au sein d’un même lieu. Il faudra remettre à la patiente qui se déplace une copie de l’ensemble des examens médicaux pratiqués. Enfin, le professionnel de santé doit garder à l’esprit que cette patiente, dans son projet migratoire, pourra montrer des réticences à l’hospitalisation, qui réduit alors ses chances de « passer ».

De la même manière que pour chaque patiente, soigner une femme exilée devra prendre en compte la personne dans sa globalité : son parcours de vie, sa situation psycho-sociale, ses conditions de vie, mais aussi ses représentations du corps et de la santé.

Grossesse

Infections sexuellement transmissibles

Les femmes migrantes sont plus exposées aux IST, par la moindre utilisation du préservatif, par le manque de dépistage et de traitement, et par la surexposition aux rapports sexuels forcés.

Selon une étude menée par J. Pannetier en 2013 auprès des femmes originaires d’Afrique sub-saharienne, un tiers des femmes vivant avec le HIV ont été infectées suite à leur parcours migratoire. Elles avaient également été plus fréquemment victimes des viols.

 

Allaitement

Les bénéfices connus de l’allaitement maternel sont d’autant plus appréciables pour une population migrante plus fragile économiquement et plus exposée aux maladies infectieuses :

  • L’allaitement maternel est suffisant pour couvrir les besoins nutritionnels de l’enfant jusqu’à 5 mois
  • Il apporte une protection immunologique
  • C’est un aliment tout prêt, à disposition, gratuit
  • Il favorise le lien mère – enfant
  • Il est un facteur protecteur contre les allergies

L’OMS recommande donc de promouvoir l’allaitement maternel auprès des femmes et des jeunes filles.

Contraception

L’accès à la contraception est plus compliqué pour les femmes migrantes. Dans ces circonstances, il est important de privilégier les contraceptions les moins onéreuses et les plus faciles d’observance.

Le préservatif est la première contraception à encourager, de par sa facilité de distribution.

Une pilule sera peu coûteuse mais plus difficile d’observance.

L’implant, ou le DIU hormonal, semblent une méthode intéressante sur le long terme mais son coût peut être un obstacle à la dispensation.

Le stérilet au cuivre, moins coûteux, ne sera pas nécessairement une bonne solution en regard des risques d’IST et de la nécessité de disposer d’une salle d’examen adéquate pour sa pose.

L’injection de Dépoprovera est, dans ce cas précis, une des méthodes les plus simples et les moins coûteuses, malgré ses effets indésirables.

Gynécologie en milieu précaire

Être femme en parcours de migration peut s’avérer très compliqué sur le plan pratique :

  • Hygiène intime et gestion des hémorragies : les protection hygiéniques sont chères, se changer à l’abri des regards peut être difficile sur un camp sauvage voire dangereux, les femmes étant alors vulnérables à des agressions
  • Gestion des mictions dans les camions : les femmes urinent parfois recours dans des couches ou des préservatifs
  • IST et vaginoses : la difficulté d’accès aux traitements, la promiscuité et les conditions d’hygiène précaires ne facilitent pas le traitement

La prise en charge gynécologique doit prendre en compte ces facteurs dans la démarche de soin.

La consultation gynécologique d’une femme en parcours migratoire va au-delà de la consultation classique et doit aussi s’intéresser à la médecine générale. Aussi, dans un contexte où la sage-femme ou le gynécologue seraient les seuls professionnels de santé accessibles aux femmes, il est important de s’intéresser à la santé générale de la patiente : dépistage des IST, statut vaccinal contre le tétanos, diagnostic et traitement de la gale, de la varicelle, …

Mutilations sexuelles féminines

Parmi les femmes exilées, nombreuses sont celles qui ont subi des mutilations sexuelles. Il est indispensable, pour bien accompagner ces femmes, d’ouvrir la parole sur ce sujet et de rappeler la protection par la Loi en France.

Source : Excision, parlons-en

Selon l’OMS, les mutilations sexuelles féminines sont des interventions qui altèrent ou lèsent intentionnellement les organes génitaux externes de la femme pour des raisons non médicales.

On estime que plus de 200 millions de jeunes filles et de femmes, toujours en vie, ont été victimes de mutilations sexuelles pratiquées dans 30 pays africains, du Moyen Orient et de l'Asie où ces pratiques sont concentrées. Tous les ans, 3 millions de jeunes filles subissent une mutilation sexuelle.

On estime qu’environ 53 000 femmes adultes excisées vivent en France, et 500 000 dans l’Union européenne.

Les justifications de ces pratiques culturelles sont nombreuses et varient d’une culture à une autre. Les explications sont souvent coutumières, l’excision est perçue comme un rite de passage incontournable pour devenir une femme, ou est pratiquée selon des justifications hygiéniques ou esthétiques (retirer ce qui serait des vestiges masculins), ou bien pour réprimer une sexualité féminine qui serait incontrôlée sans excision.

Les mutilations sexuelles féminines sont considérées comme une violation des droits des jeunes filles et des femmes. En Afrique, 24 Etats ont signé la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples qui condamne la pratique de l’excision. Les différentes instances internationales (ONU, UNICEF, OMS, …) luttent contre ces pratiques ainsi que de nombreuses associations.

Soigner et prendre soin

Une différence existe entre soigner, effectuer des actes de soins, et « prendre soin ». Cette dernière vision, plus globale, est une approche qualitative plutôt que quantitative. Auprès d’une femme malmenée par la vie, ayant vécu des violences, vivant en insécurité ou dans des conditions insalubres, « prendre soin » peut simplement consister à porter son regard sur elle, l’écouter, la considérer dans sa dignité humaine, l’accompagner dans ses démarches, la conseiller, ou simplement être là, présent, avec empathie et bienveillance.

Les demandes ou questionnements peuvent parfois paraître dérisoires, saugrenues ou insignifiants, mais il faut tout de même y répondre et les considérer avec attention. De petites choses peuvent parfois soulager le quotidien, et derrière une question anodine se cachent souvent des préoccupations plus graves. Faire preuve de disponibilité psychique et d’écoute permet à la personne de se sentir en confiance et en sécurité.